Allocation d’actifs: vague de froid automnal sur les marchés
Les attentes au sujet d'un resserrement de la politique monétaire s'intensifient.
Face à la hausse de l’inflation, les banques centrales continuent de préparer le terrain en vue d’un retrait des mesures de relance monétaire provoquées par la pandémie.
Cependant, la hausse des taux d'intérêt n'est pas la seule préoccupation des marchés actions. Les événements en Chine sont également inquiétants. La forte reprise qu’a connue le pays au lendemain de la pandémie est désormais menacée alors que Pékin lutte pour éviter l’effondrement de sa société immobilière la plus endettée, Evergrande.
Nous avons abaissé d’un point de pourcentage nos prévisions de croissance économique en Chine pour 2021-22 à 8,6%. Nous nous attendons en effet à voir les retombées de la débâcle d’Evergrande se propager à l’ensemble du secteur immobilier. L’indicateur avancé du pays recule à un taux annualisé de 5%, soit le même rythme que celui observé au plus fort de la crise de la Covid en mars 2020.
Cela ne devrait pas être une surprise étant donné que l’immobilier et les secteurs connexes représentent jusqu’à 30% du PIB chinois et que les deux tiers de la richesse des ménages se composent de biens immobiliers. Le resserrement de la politique monétaire nous a conduits à abaisser les obligations à sous-pondérer, tandis que les problèmes de la Chine nous ont convaincus d'augmenter l'exposition aux secteurs défensifs des actions et de relever les liquidités à surpondérer.
L’analyse du cycle conjoncturel montre que l’activité économique mondiale connaît une phase de consolidation. Nos indicateurs avancés mondiaux se sont contractés en août pour la première fois depuis le début de la reprise après la pandémie. Nous avons abaissé nos estimations de croissance du PIB mondial en 2021 pour le troisième mois consécutif à 6,2%, contre 6,4% le mois dernier, les reculs pour les États-Unis et la Chine étant les plus prononcés.
Même si elle ralentit, la croissance aux États-Unis reste nettement supérieure à son potentiel et selon nous, la plus grande économie du monde devrait rester solide. Les créations d’emploi et la hausse des salaires stimuleront en effet les dépenses de consommation au cours des prochains trimestres.
La pénurie de main-d’œuvre et de matières premières ainsi que la flambée des prix du pétrole et du gaz maintiennent les pressions inflationnistes à un niveau élevé, même si le rythme des hausses des prix à la consommation a ralenti au cours du dernier mois.
L’Europe continue de briller. L’indicateur avancé de la région a ainsi progressé pour le quatrième mois consécutif, soutenu par un euro plus faible, par la généreuse relance monétaire de la Banque centrale européenne et par des campagnes de vaccination réussies.
Notre analyse des liquidités montre que les banques centrales continuent de proposer de vastes mesures de relance, mais à un rythme plus lent.
Les cinq grandes banques centrales mondiales n’injectent que 500 milliards de dollars de liquidités en rythme trimestriel, le niveau le plus bas en 18 mois, alors qu’il atteignait 1 500 milliards de dollars au plus fort de la pandémie.
Cela dit, nos calculs montrent que la trajectoire de resserrement monétaire suivie par la Réserve fédérale américaine reste très tardive. Le «taux implicite» de la banque centrale, qui est corrigé de l’effet des achats d’actifs, se situe environ 500 points de base en dessous de ses niveaux d’équilibre.
Cette faiblesse persiste malgré le virage franc pris par les responsables de la Fed dans leurs communications, qui annonce un retrait plus rapide des 120 milliards de dollars d’achats obligataires mensuels de la banque centrale et une campagne de hausse des taux plus agressive, qui pourrait commencer dès la fin de 2022.
Les conditions d’accès aux liquidités dans la zone euro restent les plus souples au monde et les relances offertes par la Banque centrale européenne devraient continuer de soutenir le PIB l’an prochain – c’est la seule autorité monétaire à agir de la sorte parmi les grandes économies.
La banque centrale chinoise a augmenté ses injections nettes de liquidités en réponse à l'assèchement des financements chez les promoteurs immobiliers. Nous tablons sur un relâchement progressif des conditions d’accès aux liquidités dans tout le pays au cours des prochains mois; la Banque populaire de Chine pourrait réduire le taux de réserve obligatoire des banques pour la deuxième fois cette année, lorsque ses prêts à moyen terme arriveront à échéance.
Notre modèle de valorisation concorde avec notre dégradation des obligations et notre positionnement neutre sur les actions.
Malgré une récente hausse des rendements, les obligations restent en dessous de leur juste valeur et nous nous attendons à une nouvelle correction des prix.
Les actions ont subi leur première semaine de flux négatifs de l’année, avec plus de 24 milliards de dollars de flux sortants (voir Fig. 2).
La hausse des rendements obligataires devrait peser sur les multiples de résultat des actions étant donné la valorisation élevée de la classe d’actifs. Les bénéfices des entreprises constituent un autre signal d’alerte.
La dynamique des bénéfices a commencé à refluer, avec un bénéfice par action attendu sur 12 mois qui s’élève à présent à 20% pour l’indice MSCI All-Country World, contre 60% en juin.
Nos modèles suggèrent qu’au cours des prochains trimestres la croissance des bénéfices poursuivra sa décrue notable et que le rythme de l’expansion économique ralentira.
Nos indicateurs techniques brossent un tableau positif pour les actifs risqués, qui profitent de facteurs saisonniers et d’un sentiment modéré des investisseurs.